La couverture de ce festival de 45 000 personnes (à peu près la même taille que le Motocultor Festival), célébrant cette année sa quinzième édition sur le sol belge, à deux pas de la frontière française à Courtrai, a été une surprise pour moi.
Au départ, j’étais là pour couvrir la performance d’un groupe en particulier, mais je me suis dit que j’allais profiter de l’occasion pour vous raconter le festival dans son ensemble.
Après un trajet agréable et pas trop long, je m’installe en toute hâte pour arriver au plus vite sur le site et jouir des performances de cette affiche très bien composée.
Texte et photos par Tetralens (tetralens.com)
L’Alcatraz fête ses 15 ans
Mes pas me mènent directement à la première scène que je croise, la Morgue, où Angelus Apatrida semble avoir conquis la foule avec aisance. Je me rattraperai la semaine suivante au Motocultor pour profiter d’un set complet des Espagnols.
Le regard balayant les alentours, en pleine découverte du festival, de ses bars, de ses protagonistes, de l’ambiance, je me glisse vers la deuxième scène couverte, Helldorado, pour y découvrir Midnight.
Ce Black Metal aux accents de speed thrash s’écoute tout seul. Je ne suis pas totalement transportée, mais j’apprécie le jeu de scène et les relents de Venom ou Bathory que j’entends ici et là dans leurs inspirations.
Je m’arrête à l’espace VIP, qui comprend un bar en terrasse surplombant l’espace principal du festival, avec une vue imprenable sur la scène principale : La prison, un endroit très appréciable… D’où je serai expulsée comme une malpropre, n’y ayant finalement pas accès, juste après avoir entrevu le début de la performance de Dynazty, qui dégage une bonne énergie sur scène et par extension dans la foule.
La suite ? Taake (ex-Thule), dans la tente Helldorado. Ce black Metal norvégien sombre et chargé de brouillard obtient mon vote, notamment grâce à l’aspect immersif de leur musique, et à l’acuité de leur performance, qui me semble bien loin des controverses et des drames qui ont entouré l’histoire du groupe par le passé…
De retour à la Prison, je profite du set de Heat, un groupe de Hard Rock suédois qui ravit nombre de fans mais me laisse de marbre par ses sonorités très classiques, pour demander aux autres membres du festival où se trouve l’espace presse…
Je me glisse sous la tente de la scène Swamp pour assister à la prestation de Shadow Of Intent, dont le Deathcore me parle beaucoup plus. Le collectif américain, qui officie depuis 2013, ne manque pas d’engagement devant un public en demi-teinte.
Après un rapide rafraîchissement, où je tente de discuter avec quelques festivaliers, pas tous ouverts à la discussion, je me dirige vers la messe Thrash Metal de Sepultura sur la scène principale. Là encore, pas de découverte, mais un moment tout de même marqué par une belle ambiance et une prestation de qualité, assurée par un Andras Kisser très dynamique ainsi que Derrick Green et les autres membres.
Déjà vu en concert à plusieurs reprises, je ne me lasse pas de revoir Tribulation sur les terres de l’Alcatraz, et j’apprécie toujours autant leur metal très sombre, presque black, qui invite à l’introspection.
Je pars alors à la recherche de ce fameux espace presse… et quel périple… J’ai été invitée à quitter le site, à faire un détour de 15 minutes, à ricocher dans différentes zones, pour finalement arriver au bon endroit… où l’équipe de sécurité (la même qu’au Graspop) a regretté que personne ne m’ait expliqué que mon pass me permettait de prendre un raccourci par l’arrière des scènes… Bref. La communication laisse à désirer.
Après cet intermède, je retourne sur le site, par les chemins techniques bien sûr, pour vivre l’un des moments forts du week-end, la prestation du géant Biohazard, les pionniers du hardcore new-yorkais. Billy Graziadei interagit avec la foule, et voir Evan Seinfeld sur scène, tous tatouages dehors, sauter dans tous les sens est un vrai régal. Un vrai moment de communion avec le public.
Changement complet d’ambiance, pour la soirée colorée d’Alestorm, les pirates au canard géant. Les Écossais jouent de leurs astuces live éprouvées, comme les poses tordues et l’intervention du requin (alias le drum tech Paul White), mais ils n’en sont pas moins efficaces, avec une setlist entraînante. La foule chante à tue-tête dans une ambiance très joviale.
Ma soirée se termine par un moment très attendu, tant par moi que par la foule entassée sous la tente de la scène Swamp : le set de Heaven Shall Burn. Les Allemands, menés par le charismatique Marcus Bischoff, déchaînent puissance, rage et mélodie dans un flot continu de deathcore/Death Metal parfait. Bien que les ayant déjà vus en concert, cette prestation m’a particulièrement marquée et je suis ravie d’avoir assisté à ce moment d’anthologie.
Le dimanche se lève sur le camping, où ma nuit a été fortement perturbée par des voisins bruyants et franchement peu scrupuleux de l’environnement. J’enjambe les cadavres de canettes et autres détritus abandonnés pour rejoindre le site de l’Alcatraz, où le temps est à nouveau au beau fixe.
Je commence ma journée avec Annisokay, une sorte de Post-Hardcore allemand, propre, technique, mais un peu sage.
Sur les conseils d’un collègue photographe, je me suis arrêtée sur le set de Serpents Oath. Les locaux (belges) proposent un black metal immersif à travers des titres de leurs deux albums, dont Ascension de 2022, et préparent l’arrivée de leur troisième opus pour novembre 2023.
Toujours devant la scène du Swamp, j’assiste à la prestation d’Archspire, aussi dynamique que technique, dont la décontraction (shorts d’été, débardeurs roses, etc.) n’enlève rien au sérieux de leur démarche musicale. Les Canadiens, notamment Oli Peters (chant), Jared Smith (basse) et Spencer Prewett (batterie), excellent dans leur style death metal technique.
Retour à la lumière du jour, pour (re)voir un autre groupe que j’adore, Sacred Reich. Outre leur excellent mélange de thrash metal et ce je ne sais quoi de typiquement US qui leur donne leur propre identité, les musiciens sont toujours l’expression même de la bonne humeur, de la générosité et de la présence scénique, en particulier mon préféré Wiley Arnett, génie de la guitare.
Ce n’est pas la première fois, ni la dernière, que j’assiste avec plaisir à la prestation de Bleed From Within, dont la réputation semble s’être décuplée depuis leur album Shrine (2022). L’été 2023 a été marqué par leur omniprésence, mais sans jamais se lasser. Un son puissant et bien caractérisé qui a donné un coup de jeune au Metalcore nouvelle génération. Peu de passages vocaux clairs, mais un sens de la mélodie particulièrement appréciable. Mention spéciale à Ali Richardson, qui marque l’identité du groupe, ainsi qu’à Steven Jones à la guitare et au chant secondaire. Je m’en fiche, je retournerai (encore) voir “Bleed” la semaine prochaine, histoire de retrouver Scott Kennedy (chant) et les autres.
Après une telle prestation, il est difficile d’entrer complètement dans le set de Gatecreeper, qui se distingue pourtant par un death metal âcre et de qualité.
Après de nombreuses occasions manquées, je vois enfin Dying Fetus en concert. La force de leur brutal death metal, qui frôle parfois le grind, ne dégage pas l’énergie que j’espérais. Peut-être est-ce une question de circonstances, et de manque de mise en scène…
Encore une fois, changement radical d’ambiance, avec les joyeux lurons de Gloryhammer, et leur entrée en scène, toujours à l’effigie de Tom Jones en guise de préambule. Leur Power Metal britannique, même s’il n’est pas votre style de prédilection, vous entraîne dans leur univers d’Heroic Fantasy. Leur jeu de scène sans concession est interprété comme une pièce de théâtre, et l’on est sûr de passer un bon moment. Il ne manquait plus qu’un dragon traversant le ciel ensoleillé pour que la foule soit encore plus immergée.
Les poids lourds allemands du power metal, Blind Guardian, en proposent une autre version. Moins de déguisement, mais un sens plus poétique de la mélodie, une inspiration sur l’univers de Tolkien parfaitement assumée. Ils sont attendus et appréciés par une foule massive et joyeuse. Hansi Kürsch se moque de sa propre autosatisfaction : “C’est logique si vous appréciez la performance, Blind Guardian est le meilleur groupe de tous les temps…”.
Bien que très bon, je dois remettre en question cette affirmation… surtout maintenant.
Après des phases où j’ai cru faire une crise cardiaque, tant l’obtention de mon accès fut tardive, me voilà prête à officier depuis la scène, pour immortaliser la prestation de Killswitch Engage.
Un moment suspendu, majeur pour moi, de revoir ce groupe si spécial à mes yeux, qui représente la quintessence de l’expression musicale qui me touche le plus. Et ici, sur scène, avec eux.
Jesse Leach, en pleine forme, démarre sur les chapeaux de roues avec My Curse, l’un des titres phares du groupe. Au fil des chansons, Rise Inside, This Fire, Adam D. fait preuve d’une énergie incomparable, dans sa chemisette ananas KSE (que certains fans tentent de se procurer…). Je garde mon sérieux, capturant la connexion de Mike avec la foule, même pendant l’un de mes morceaux préférés, In Due Time.
La foule est absolument captivée, les slams se multiplient, et la setlist parfaite se déroule, Unleashed, Hate by Design, Rose of Sharyn, et notre guitariste, aussi fou que talentueux, va à la rencontre du public, marchant sur les barrières devant le premier rang, tandis que Justin Foley et Mike D’Antonio redoublent de brio sur scène – et que Jesse est saisissant dans sa maîtrise vocale.
Cette heure de pur bonheur s’achève sur le tube incontestable, la réinterprétation de Holy Diver (de Dio) qui a contribué à faire de Killswitch la référence des précurseurs du metalcore. KSE reçoit une ovation bien méritée.
Préférant rester sur ce moment magique, je clôture mon festival par cette prestation de grande qualité, chargée d’émotion, en repartant avec en fond sonore le début du concert d’Electric Callboy qui, comme d’habitude, est un véritable succès.
Malgré quelques couacs de communication plus que d’organisation, l’Alcatraz Festival est un bel exemple de rassemblement de la communauté metal à une échelle raisonnable, avec une programmation de très grande qualité, un site plutôt agréable, et des stands variés et bien placés. Néanmoins, j’ai eu du mal à parler aux festivaliers et au personnel, ce que je déplore, même si je peux comprendre le côté flamand et fier des choses…
Un incontournable des festivals de musique extrême.
À propos de Tetralens
Cet article a été rédigé par Tetralens, qui est également la propriétaire de toutes les photos que vous avez vues ci-dessus.
Tetralens est une photographe basée à Paris. Si vous souhaitez discuter avec elle de son travail et/ou collaborer avec elle, vous trouverez toutes ses informations ci-dessous !
TETRAlens rassemble toutes les expressions de mon travail photographique, récent ou datant de plusieurs années. J’y présente principalement un extrait de mes captures de concerts live, essentiellement issus de la scène Metal et Rock, ainsi qu’un petit aperçu de mes autres sujets photographiques, tels que les paysages, les détails et l’architecture. D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours voulu capturer à travers mon objectif ce que mes yeux voulaient immortaliser : le tranchant d’une lumière, la force d’un instant, la douceur d’un regard, l’énergie d’un moment, ces choses qui rendent le monde plus beau. Depuis mon plus jeune âge, cette passion m’a suivi dans mon quotidien ou dans mes voyages, mes yeux regardant constamment la nature, les villes et les gens comme une source d’inspiration pour nourrir mon expression artistique. Le canal le plus emblématique étant la musique live, les événements à travers lesquels l’humain est un vecteur des vibrations les plus positives.