Retour sur le Motocultor 2023 : “Les étoiles dans les yeux du public sont un spectacle presque aussi doux que celui qui se déroule sur scène…”

à 22h50
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Retour sur le Motocultor 2023 : “Les étoiles dans les yeux du public sont un spectacle presque aussi doux que celui qui se déroule sur scène…”
© Tetralens

Un nouveau jour se lève sur Carhaix, et les anecdotes de camping fusent, notamment des légendes urbaines sur d’étranges bruits émergeant au milieu de la nuit, et les hypothèses fusent sur les protagonistes et les origines…

Entre les pains au lait et les jus de fruits, les têtes approximatives qui ont manifestement veillé tard (ou jusqu’à tôt…) au Macumba, et les visages fraîchement douchés et propres, se rassemblent en quantité à mesure que le soleil voilé poursuit sa course.

Le flot des festivaliers commence à se diriger vers le site, les nouveaux arrivants doivent faire preuve de patience à l’entrée, tandis que quelques charrettes lourdement chargées de tentes et d’autres fournitures de camping arrivent encore sur le site.

Le passage à la sécurité est assez long, mais consciencieusement effectué, et je note avec amusement la bienveillance mêlée de désapprobation dans les yeux et les paroles de la fouilleuse qui débusque un subterfuge d’alcool caché dans un sac de compote…

Texte et photos par Tetralens (tetralens.com)

C’est reparti !

Allez, on y va ! Dans la lourdeur typique des heures qui précèdent un orage, je vais voir Boisson Divine sous l’un des chapiteaux. Les Gascons sont de très bonne humeur, qu’ils répandent dans le public avec leur accordéon et leur flûte. Le public est assez disparate, entre les premiers rangs bien impliqués et la frange arrière de la foule, où cohabitent des poses nonchalantes, une séance de beer-pong et un pique-nique bio (oui, oui, des branches de céleri crues, on vous dit)…

N’en déplaise à certains, les métalleux de 2023 sont des individus aux multiples nuances, bien loin du cliché monolithique du bouffeur de viande poilu et bruyant !

Sur le Dave Mustage, Gorod réveille un peu plus férocement les foules, avec son death metal technique et le chant puissant de Julien “Nutz” Deyres.

© Scrime Photography
© Scrime Photography

Sous la tente Massey Ferguscène, les Belges de Psychonaut prennent le relais. Du post-metal psychédélique avec un côté sludge posé. Presque trop posé. Mais je note la précision de la composition, et je suis ravie de les voir en live, moi qui les avais manqués quelques jours plus tôt à l’Alcatraz (en Belgique).

Les Espagnols de Crizix livrent un set énergique sur la scène principale à un public attentif heureux de headbanguer sur leur thrash metal efficace.

© Scrime Photography
© Scrime Photography

Je manque Hrafngrimr (ce que je regrette, car je connais bien le génie de l’éclairage qui officie pour eux). Voilà une bonne occasion de me rattraper à la prochaine date… Mais c’est pour la bonne cause : Je rencontre le cerveau de Wardruna, le Norvégien Einar Selvik, qui évoque dans cette interview toute une série d’aspects fascinants, de la scène black metal à son style d’écriture, en passant par le regain d’intérêt pour la musique pagan (voir l’interview).

De retour à l’espace presse, où j’en profite pour ressortir quelques photos de la veille, avec un délicieux café glacé, j’entends le son de Gggoolddd qui s’échappe de la mainstage et regrette de l’avoir raté… Idem, un autre groupe vient d’atterrir sur ma wishlist…

Retour en première ligne pour Hypno5e, qui a malheureusement ajourné son passage en 2022… Le metal expérimental ou cinématique (comme ils le définissent eux-mêmes) de ces Français de Montpellier crée une sensation de suspension dans le temps et l’espace, qui peut être déconcertante pour ceux qui ne s’immergent pas totalement dans l’ambiance. Mais le public semble conquis.

Ensuite, Lili Refrain… que j’avais hâte de revoir depuis qu’elle avait fait la première partie de Heilung il y a quelques mois à l’Olympia. La performance captive le public dès les premières notes et s’avère être un véritable triomphe. La salle est envoûtée par les sonorités uniques et enveloppantes de folk expérimental, de strates superposées et d’arrangements électro, sur fond de dark-wave où l’on retrouve l’esprit initiatique des classiques de Dead Can Dance. On est sous le charme, et même les curieux arrivés par hasard sont happés par son univers singulier.

 

Toutefois, cela n’a pas empêché Insomnium d’infliger la gifle attendue d’un tout autre genre (le death metal mélodique) en parallèle sur la scène principale.

© Scrime Photography
© Scrime Photography

Terror, collectif américain précurseur du hardcore West Coast, se lance dans un set puissant sous le chapiteau Massey Ferguscène. Ils n’ont pas fini de faire parler d’eux, démontrant à la fois leur engagement et leur savoir-faire.

  

Le temps change, le ciel s’assombrit et la pluie annoncée tombe un peu plus franchement. Les ponchos de toutes sortes font leur apparition, et les flaques de boue occasionnelles donnent aux festivaliers une démarche un peu hésitante…

Sous l’une des scènes couvertes, c’est au tour de Luc Arbogast de donner de la voix. Il attire et concentre tout ce que le Motocultor compte de plus médiévistes, de princesses elfiques et de chevaliers dragons, et tout ce petit monde se presse en masse devant les crashs barrières pour voir et surtout écouter le contreténor.

 

Quel plaisir de retrouver cet artiste après tant d’années. Je me souviens des déambulations solitaires de cet artiste hors du commun lors de rencontres médiévales, aujourd’hui inscrites dans la programmation des festivals de musiques extrêmes, où la singularité de son univers et de sa voix ont toute leur place, comme il le souligne à juste titre.

La pluie est désormais une constante, mais cela ne m’empêchera pas d’assister à la prestation de Napalm Death, qui donne une leçon de grindcore à la sauce marmite, sous une pluie qui habille le spectacle d’une atmosphère presque féerique, très en contraste avec le son et le jeu de scène démesuré de Barney Greenway et de ses acolytes.

 

L’avant de la Dave Mustage est plein à craquer, et personne ne veut manquer le set d’Epica, dont les décors de scène déjà en place annoncent le contenu du show imminent… Serpent de métal, roues géantes (de hamster), arrière-scène… On sait d’avance que l’on va en prendre plein les yeux quand, comme pour parfaire le décor, la pluie s’arrête… Un bon présage. Et en effet, dès le début, Mark Jansen et sa troupe, avec la sculpturale Simone Simons comme générale des troupes, toute de perles et de strass vêtue (comme une muse métallique, mais pailletée quand même) proposent une succession de tubes tels que Unleash, Code of Life ou l’incontournable Consign to Oblivion, accompagnés de pyrotechnie façon grand méchoui.

Les étoiles dans les yeux du public sont un spectacle presque aussi doux que celui qui se déroule sur scène…

     

En allant manger, je croise Uuhaii, qui joue du folk metal mongol… qui manque un peu d’énergie et de précision…

La journée se termine par la cérémonie de Wardruna. Dans un calme quasi chamanique, le collectif nordique débute sa performance par des ombres, puis l’apparition progressive de sons et de notes pour une expérience immersive qui va crescendo. Certains morceaux sont plus puissants que d’autres, comme l’émouvant Helvegen. Le set est tellement cathartique, vous plongeant dans des couches de brouillard onirique (parfaitement mises en scène d’ailleurs) avec une force viscérale… Un superbe moment de musique et d’introspection, où Lindy Fay Hella et les autres musiciens offrent une performance délicate qui s’équilibre parfaitement avec l’incroyable présence d’Einar Selvik.

Ce moment suspendu marque la fin de ma longue journée, pleine de grands moments musicaux et humains.

À propos de Tetralens

Cet article a été rédigé par Tetralens, qui est également la propriétaire de toutes les photos que vous avez vues ci-dessus (à l’exception de celles de Scrime Photography).

Tetralens est une photographe basée à Paris. Si vous souhaitez discuter avec elle de son travail et/ou collaborer avec elle, vous trouverez toutes ses informations ci-dessous !

TETRAlens rassemble toutes les expressions de mon travail photographique, récent ou datant de plusieurs années. J’y présente principalement un extrait de mes captures de concerts live, essentiellement issus de la scène Metal et Rock, ainsi qu’un petit aperçu de mes autres sujets photographiques, tels que les paysages, les détails et l’architecture. D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours voulu capturer à travers mon objectif ce que mes yeux voulaient immortaliser : le tranchant d’une lumière, la force d’un instant, la douceur d’un regard, l’énergie d’un moment, ces choses qui rendent le monde plus beau. Depuis mon plus jeune âge, cette passion m’a suivi dans mon quotidien ou dans mes voyages, mes yeux regardant constamment la nature, les villes et les gens comme une source d’inspiration pour nourrir mon expression artistique. Le canal le plus emblématique étant la musique live, les événements à travers lesquels l’humain est un vecteur des vibrations les plus positives.

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