Le "retour" de l'industrie de la musique est-il surestimé ? Un regard honnête sur les dernières statistiques

à 17 h 54 min
Lecture 5 min.
Le "retour" de l'industrie de la musique est-il surestimé ? Un regard honnête sur les dernières statistiques
© Unsplash

Il y a quelques années à peine, l’industrie de la musique contemplait la fin de son existence. Pour une industrie qui a failli s’effondrer du jour au lendemain, les dernières années ont été une aubaine. Néanmoins, est-il temps d’arrêter de fêter sa supposée renaissance ? Tout ce qu’on dit à propos du “retour de l’industrie de la musique” est-il trompeur – et potentiellement préjudiciable pour la croissance future ?

Un “retour” à l’impact relatif

On pourrait dire que les chiffres récents de la Fédération internationale de l’industrie phonographique jouent un peu le rôle de trouble-fête. 2018 a été de loin l’une des meilleures années de l’histoire récente, avec des revenus de streaming en forte hausse qui ont compensé le déclin des CD et des téléchargements.

Cependant, le niveau des ventes en 2018 ne peut être considéré comme un “retour” que par rapport aux quelques dernières années. Ce “retour” reste faible en comparaison de la période de 2006 à 2007, et il est encore bien en deçà des sommets de 1999.

Le "retour" de l'industrie de la musique est-il surestimé ? Un regard honnête sur les dernières statistiques

À lire aussi : Les Français de Greyborn dévoilent un clip vidéo envoûtant pour Scars

De bonnes nouvelles

Mais qui a dit que le retour était terminé ? Le récent rapport semestriel de la RIAA aurait aussi bien pu être imprimé sur une bouteille de champagne. En effet, les revenus continuent de croître, et même les CD montrent des signes de stabilisation.

Les abonnements à la musique, qui offrent des revenus beaucoup plus importants que les comptes publicitaires, ont contribué à cette augmentation. Dans l’ensemble, les revenus de diffusion en continu (streaming) ont bondi de 26,4 % pour s’établir à 4,31 milliards $, ce qui fait partie d’un bilan semestriel de plus de 5 milliards $.

Le "retour" de l'industrie de la musique est-il surestimé ? Un regard honnête sur les dernières statistiques

Pas de ralentissement à l’horizon malgré l’apparition de nouveaux challenges

Pourtant, une crainte conventionnelle subsiste de nos jours. Beaucoup ont peur que la forte croissance du streaming mène à un plateau, avec des méga-marchés comme les États-Unis, le Royaume-Uni, la Suède, l’Allemagne, l’Australie/NZ, la Corée du Sud et le Japon qui arriveront rapidement à saturation.

Les pays en développement comme l’Inde et des régions comme l’Amérique latine sont donc de nouveaux champs de bataille. Mais le jeu des revenus dans ces endroits est beaucoup plus délicat. L’Inde offre l’exemple parfait : malgré plus d’un milliard d’habitants, l’indien moyen n’a pas les moyens d’avoir un compte à 10 $ par mois, (même à 1 $ par mois, en réalité). Il en résulte une forte déflation de l’ARPU (Average Revenue Per User), les coûts d’exploitation dépassant souvent les abonnements ou les gains de revenus publicitaires.

Le mois dernier, Spotify a présenté son plan familial en Inde. Le prix : 2,52 $ par mois pour une “famille” de six personnes, ce qui reste plus cher que l’offre bas de gamme d’Apple Music. Ce modèle d’affaires qui semble déjà tendu est encore plus compliqué qu’il n’y paraît, car les deux entreprises luttent contre une liste d’opérateurs historiques bien situés et à faible coût. D’où l’inquiétude sans fin face au plafonnement des revenus mondiaux de diffusion en continu.

De plus, 1999 est tout simplement une époque révolue. Il s’agit d’une relique du passé alimentée par l’avènement du CD, qui ne pourra jamais être reproduite. L’industrie d’aujourd’hui est différente et il n’est pas sage de la traiter de la même manière qu’auparavant.

Il semblerait que le streaming soit aussi à l’origine d’une augmentation continue dans certaines catégories d’entreprises séculaires. Cela inclut les disques vinyles, qui sont toujours en plein essor. On pourrait dire que ce gain se produit malgré la diffusion en continu. Néanmoins, l’hypothèse la plus récente soutient que l’essor du vinyle serait dû au streaming.

Le "retour" de l'industrie de la musique est-il surestimé ? Un regard honnête sur les dernières statistiques

Les concerts reprennent du poil de la bête

L’industrie des concerts est également une grande gagnante à l’ère numérique – depuis l’époque de Napster. La raison en est que les gens considèrent généralement les spectacles en direct comme une expérience plus profonde. Le streaming et YouTube étant considérés commes des amuse-bouches agréables.

Mais l’industrie pourra-t-elle vraiment dépasser ses sommets de la fin des années 90 ? Cela dépend peut-être beaucoup de la croissance du streaming au cours des prochaines années. Plus tôt aujourd’hui, l’Entertainment Retail Association prévoyait que les revenus générés par le streaming doubleraient d’ici 2023 au Royaume-Uni (malgré le Brexit). Il s’agit d’une croissance de 1 milliard de dollars de revenus supplémentaires, avec un taux de croissance annuel de 18 %. Par la suite, les statistiques estiment également une croissance de 2,1 milliards de dollars en quelques années à peine. Cela contraste avec les perspectives les plus sombres qui ont déjà été annoncées. Bien que la réalité se situe probablement entre les deux.

L’avenir est grand ouvert et se construit maintenant

Le “retour” de l’industrie peut donc être envisagé de plusieurs façons en cette fin d’année 2019. On peut être pessimiste, et penser que tout va s’écrouler et plafonner. Ou on peut être plus optimiste, et penser que c’est le départ de beaucoup de croissance et d’innovation. Même avec un plafonnement des revenus de streaming, des gains de revenus plus importants sont certainement possibles – même si ces gains sont basés sur une base stable d’amateurs de streaming de musique.

Source : Digital Music News

Tags : Heavy Metal