Dee Snider (Twisted Sister) pense que la “cancel culture” est une nouvelle forme de censure

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Dee Snider (Twisted Sister) pense que la “cancel culture” est une nouvelle forme de censure
© Dee Snider

Lors d’une interview accordée à Banfield, émission de télévision présentée par Ashleigh Banfield sur la chaîne NewsNation, Dee Snider, l’emblématique figure de proue de Twisted Sister, qui a été auditionné par une commission du Sénat américain en 1985, au sujet de la proposition d’imposer un étiquetage spécifique aux albums jugés offensants pour les jeunes auditeurs, s’est à nouveau exprimé sur la montée en puissance du politiquement correct à l’ère des réseaux sociaux.

Interrogé sur son opinion concernant la “cancel culture”, qui consiste dans les grandes lignes à dénoncer et à boycotter une personne, généralement une célébrité ou une personnalité publique, dont les idées ou les commentaires sont jugés désormais offensants, Dee Snider a déclaré :

C’est de la censure. Et la censure a beaucoup évolué. Je veux dire, rappelez-vous de l’époque où j’étais à Washington pour témoigner. D’ailleurs, c’était un effort bipartisan – ce sont les démocrates et les républicains qui se sont unis pour mettre une laisse au Rock ‘n’ Roll. Mais c’était définitivement une attitude conservatrice – c’était une attitude encore plus conservatrice, qui essayait de censurer la musique. Aujourd’hui, la censure existe toujours, mais elle est passée de la droite à la gauche. Nous sommes dans l’ère du politiquement correct, où nous devons faire attention à ce que nous disons et à qui nous offensons, et c’est très étrange.

Il a poursuivi :

Je travaillais sur les paroles de mon nouvel album, Leave A Scar, qui sortira en juillet prochain, et je me suis retrouvé à douter des métaphores que j’utilisais. Je veux dire, où est l’art sans métaphore ? Que deviennent les paroles et l’écriture sans métaphore ? Pourtant, je me répétais : “Puis-je dire ceci ou cela ?”. J’ai une chanson qui s’appelle In For The Kill, et elle regorge de métaphores : “Fire at will, I’m in for the kill”(Feu à volonté, je suis là pour tuer). Et je parlais de foncer, tout simplement de foncer, mais je me censurais au niveau des paroles à cause de l’ambiance actuelle.

Il a ajouté :

Comment déterminer ce que l’on peut censurer ou pas ? À mon avis, je pense que tant que tu ne cries pas “Tirer !” dans une salle de cinéma bondée, ça passe.

L’année dernière, Dee Snider a déclaré au magazine canadien The Metal Voice qu’un film tel que Blazing Saddles, la comédie satirique de 1974 réalisée par Mel Brooks, “ne pourrait pas être réalisé aujourd’hui”.

Il ne pourrait littéralement pas être réalisé, car il dérangerait beaucoup trop de gens. Je me rappelle avoir vu ce film pour la toute première fois dans un cinéma rempli d’Afro-Américains, dans un quartier afro-américain, dans un cinéma afro-américain ; mon ami et moi étions les deux seuls blancs. Et j’étais mort de rire. Et il m’a dit : “Arrête de rire. On va se faire botter le cul”. J’ai regardé autour de moi et tout le monde riait. J’ai répondu : “Tout le monde rit”. Quand c’est drôle, c’est drôle !

Il a conclu :

C’est étrange, parce que le conservatisme émanait de l’extrême droite dans les années 80. Désormais, il s’est déplacé vers la gauche, et les libéraux vous disent : “Oh, vous ne pouvez pas dire ceci, et vous ne pouvez pas dire cela, et ça non plus !”. Alors, oui,  la censure existe encore et c’est toujours un problème. Mais nous devons continuer à nous battre et à repousser les limites.

En 1985, le célèbre lobby Parents’ Music Resource Center (PMRC), alors dirigé par Tipper Gore, a voulu mettre en place un système de signalement qui étiquetterait tous les albums jugés offensants. Il s’agissait d’un ensemble de lettres qui permettraient d’identifier facilement le type de contenu répréhensible présent dans chaque album (par exemple, O pour les thèmes occultes, S pour le sexe, D pour les drogues, V pour la violence…), ce qui a donné naissance au célèbre étiquetage “Parental Advisory : Explicit Content” que l’on retrouve désormais sur tous les albums jugés avoir un contenu douteux. Le trio improbable formé par Dee Snider, Frank Zappa et John Denver a alors été auditionné par une commission du Sénat américain.

En 2015, Dee Snider a rédigé un article pour HuffingtonPost.com au sujet de son expérience personnelle et a déclaré :

Trente ans plus tard, presque rien n’a changé… Les ultra-conservateurs veulent toujours dicter ce qu’ils jugent acceptable de voir et d’entendre pour le grand public. L’industrie musicale n’est plus que l’ombre d’elle-même (punition légitime de sa lâcheté), et les albums et les vinyles sont presque devenus des “nouveautés” dans un monde dominé par le téléchargement. Pourtant, les étiquetages d’avertissement ornent toujours les playlists et les albums en ligne.

Il a conclu :

Si, au départ, ma participation à ces auditions sénatoriales a été préjudiciable à ma carrière et à ma réputation, elle a finalement été bénéfique à long terme, en montrant pour la première fois aux gens que j’étais bien plus qu’un taré sous acide, j’étais une personne plutôt intelligente et sensible. Heureusement, je suis passé à autre chose.

Twisted Sister a mis fin à sa carrière en 2016 après avoir effectué une tournée d’adieux pour son 40ème anniversaire.

Extrait de l’interview de Dee Snider par Ashleigh Banfield :

Source : blabbermouth.net